La naissance de Plougasnou
Sources
Plougasnou son histoire, son patrimoine. Louis Le Guennec
Edité par la Section Patrimoine du Foyer Rural de Plougasnou
Hier Plougasnou. Jean Quinquis
L'agglomération de Plougasnou fut sans doute fondée de 514 à 525, lors de la grande émigration des Domnonéens insulaires qui, chassés de leur patrie d'origine, la Grande-Bretagne, par les incessantes attaques des pirates danois et saxons, traversèrent la mer pour venir s'établir sur les rivages de l'Armorique, et imposèrent le nom de Domnonée à la région continentale où ils s'installèrent, du Couesnon à l'Elorn.
Les populations bretonnes qui fuyaient leur île envahie, s'embarquaient par clans entiers, emmenant avec eux leurs prêtres, leurs moines, les reliques de leurs Saints, pour venir en Armorique, alors dépeuplée, couverte de forêts, vide d'habitants sur les côtes depuis les ravages des Alains et des Saxons au Ve siècle. Dans cette contrée déserte s'installa tranquillement, sous l'autorité du machtyern qui la conduisait, sous la direction religieuse des moines et prêtres qui l'avaient suivie, la nouvelle forme du plou armoricain.
On peut supposer que Plougasnou a pris le nom du machtyern ou chef qui fut son fondateur (Plou-Cathnou, c'est-à-dire la peuplade de Cathnou). Ce nom est réellement celtique, car on le retrouve porté par l'un des abbés de Landévennec, cinquième successeur de Saint Guénolé.
Après avoir fondé un vaste plou sur le littoral, Cathnou remonta la vieille voie pavée qui reliait le camp romain ruiné de Primel à l'intérieur de la région et ne s'arrêta qu'au pied des montagnes d'Arrée.
Le plus ancien document historique où apparaît le nom de Plougasnou est la Charte de donation de cette paroisse par la Duchesse Berthe de Bretagne et de son fils Conan, à l'abbaye Saint-Georges de Rennes en 1039. Cette charte indique la physionomie du pays à cette époque : prairies; bois, dont une partie était inculte et sauvage, couvraient la paroisse. Une partie de ces bois devait encore exister au commencement du XVIIe siècle, car les anciens comptes de fabrique font mention de fortes primes accordées par la paroisse aux veneurs des châtelains d'alentour lorsqu'ils réussissaient à détruire un des loups qui jetaient la crainte dans la région.
Par la réformation de 1543, les noms des manoirs étaient classés par fréries. Autrefois, la paroisse de Plougasnou comptait seize fréries : Guicaznou, Trégastel, Tréménec, Kermorfézen, Perros, Térennez, Kerbabu, Kermadeza, Kersaint, Kerdenoy, Kermouster, Mériadec, Kervron, Donnant, Quenquizou, Tréhenvel. Les cinq dernières composent, depuis 1790, la commune de Saint-Jean du Doigt.
La réformation de 1543 énumère l'incroyable quantité de maisons nobles que contenait la paroisse (au moins 170), et on y voit un fidèle tableau de la noblesse bretonne au XVIe siècle.
Primel-Trégastel, une position stratégique à travers les siècles
Du sommet du grand rocher on domine la mer de près de cinquante mètres. Cette pointe granitique se trouve détachée de la presqu'île par "le Gouffre", couloir de 8 à 10 mètres de large dont les roches les plus tendres ont été érodées par la montée des eaux, il y a 10 000 ans. La presqu'île qui relie la pointe au continent est due à la rencontre de deux courants, dont l'accumulation des dépôts, a formé sur une longueur de 35 mètres ce que les géologues nomment une queue de comète. Cette disposition du site a incité les hommes à y trouver un moyen de se protéger et de se défendre derrière les lignes de granit renforcées par des empilements de pierres et constituer ainsi un éperon barré. Au cours des siècles, la position stratégique de la pointe de Primel a été disputée par de nombreux belligérants. Les Vikings y ont pris pied dans les années 800 à 900. Les Anglais s'y sont installés pendant la guerre de cent ans, et même après, comme tremplin pour l'invasion du continent. Vers 1490, les Morlaisiens aménagent le site en poste de vigie pour la surveillance du trafic maritime. Pendant les guerres de la Ligue, les Espagnols, alliés des Ligueurs, en font une place forte. Sous Louis XIV, Vauban y place une batterie de deux canons en complément du renforcement du fort du Château du Taureau qu'il vient de réaménager. Plus tard, Napoléon 1er décrète le blocus continental et fait construire la "Cabane des Douaniers " pour surveiller les parages.
Le doigt de Saint Jean Baptiste
Evénement important dans les annales de Plougasnou : la translation du Doigt de Saint Jean Baptiste, vers 1420, dans une petite chapelle dédiée à Saint Mériadec. En effet un pieux soldat breton, si dévot à la Relique conservée alors dans une église de Normandie, qu'elle ne voulut plus le quitter et qu'elle l'accompagna en Bretagne à son insu ! Cette Relique créa à Saint-Jean un foyer de dévotion et attira des multitudes de pèlerins espérant voir guérir leurs maladies des yeux et autres infirmités. En 1505, miracle à l'occasion du voyage d'Anne de Bretagne. Elle a l'intention de se faire apporter la Relique de Saint Jean à Morlaix pour l'appliquer sur son œil malade. Le clergé du pays s'est rassemblé pour escorter le Saint Doigt, mais à peine sorti du cimetière le reliquaire éprouve une forte secousse… après ouverture de celui-ci on constata qu'il n'y était plus… Il était retourné dans l'église. A cette nouvelle, la reine Anne se rendit à Saint-Jean et se fit appliquer le doigt sur son œil, enflé par une "défluxion" qui disparut instantanément. Elle témoigna sa reconnaissance en faisant à l'église une princière offrande et en donnant des ordres pour son achèvement.
Trois siècles plus tard, la modeste chapelle s'était transformée en une belle et monumentale église. Elle continuait néanmoins de dépendre de la paroisse de Plougasnou. En 1784, les habitant de Saint-Jean se réunirent pour nommer un corps politique et finalement, un arrêt de la Cour en date du 18 juin 1790, leur donna raison et Saint-Jean fut érigée en commune.
L'église Saint Pierre de Plougasnou
Depuis 1857, l'église de Plougasnou a subi de grands changements, toute l'aile gauche et le haut de l'aile droite ont été refaites. La façade sud de l'église offre un aspect monumental, avec son haut et robuste clocher de granit, étayé de solides contreforts pour résister aux grands vents qui soufflent de la mer toute proche. Ses pignons de fenêtre ornementés, son joli porche de la Renaissance, le porche latéral est surmonté d'un clocheton et accosté de deux contreforts surmontés de clochetons semblables et muni de loges à statues. La date de 1616 se lit sur celui de gauche. Au milieu du fronton se voit, dans une niche renaissance, une statue de Saint Pierre, patron de la paroisse et de l'église. La porte intérieure est décorée de deux jolies colonnes cannelées soutenant un fronton triangulaire au milieu duquel émerge à mi-corps le buste d'un personnage portant fraise et bonnet à bords retroussés. Au dessus, dans une petite niche se trouve une Pietà en pierre.
Le portail situé au bas du clocher est surmonté d'un écusson entouré du collier de Saint-Michel et de deux autres plus petits. Le porche est voûté en pierre avec une clef feuillagée et une corniche. Deux jolies colonnes à fût renflé et à chapiteaux d'un style corinthien encadrent la porte en soutenant un fronton triangulaire. Le porche porte à l'intérieur le nom de l'architecte du clocher : Maître Jean Taillanter, le 8 octobre 1582. Depuis le porche latéral jusqu'au fond de l'église : trois arcades romanes du XIe siècle, séparant le bas-côté de la nef, c'est la partie la plus ancienne de l'église. Le retable du maître-autel provient de l'église de Saint-Matthieu de Morlaix (1713). C'est une œuvre de la Renaissance, formée de trois tourelles ajourées. Le chœur de l'église doit remonter au Xve siècle. Le bas-côté gauche a été refait dans la deuxième moitié du XIXe et ne contient plus qu'un autel, celui du rosaire, exécuté en 1667 et 1668.
On a déplacé la chapelle du Sacre au nouveau cimetière dans les toutes dernières années du XIXe. Construite à la fin du XVIe siècle dans le cimetière paroissial, elle servait de reposoir au Saint-Sacrement lors des processions.
L'Oratoire de Notre-Dame de Lorette
L'Oratoire de Notre-Dame de Lorette est situé à l'est du bourg. On y voyait trois statues, une belle Vierge Marie, un saint prêtre et une statue de bois mutilée. Cet oratoire fut bâti en 1611 par Jeanne de Keredan. Autrefois, les jeunes filles offraient leurs cheveux à Notre-Dame de Lorette pour obtenir la grâce de trouver de bons maris.
L'oratoire Notre Dame de Lorette est implanté le long du chemin reliant le bourg de Plougasnou à celui de Saint-Jean du Doigt.
A l'époque de sa construction ( 1610 - 1611 ), situé en plein champ, sur le haut du coteau Sud de la rivière de Saint-Jean du Doigt, il était visible de loin.
Ce petit édifice de 3,15 m sur 4,20 m a été édifié sur un plan rectangulaire axé rigoureusement Est-Ouest au commencement du 17ème siècle. Sa hauteur est de 5 mètres environ. Il est construit en pierres de granite appareillées de la base au sommet.
L'une de ses particularités est d'être couvert par une voûte en pierre dont la forme ressemble à celle des tombeaux lyciens.
Les quatres façades du bâtiment sont remarquables et ont été conçues et édifiées pour mettre en valeur l'entablement et la frise avec ses inscriptions lisibles à partir des piédroits Ouest.
Façade Ouest : Ouverte par un arc en plein cintre dont la clé supporte une tête sculptée, surmontée d'un antéfixe.
Façade Sud : Deux statues, une caryatide et un telamon, encadrent une ouverture axiale rectangulaire. Elles reposent sur le soubassement de l'édifice et supportent l'entablement. A droite de la caryatide, un trumeau plein est orné de l'écusson portant les armoiries qui seraient celles des Le Floc'h de Kerbasquiou et des Tromelin du Merdy.
Façade Est : C'est un mur qui monte de fond, du sol jusqu'à la clé de voûte. Il sert de support depuis le dessus de l'entablement aux différentes assises des pierres des voûtes Nord et Sud. Il est ajouré d'une partie ovale qui est le motif principal de décoration de ce mur. A noter une saillie de 5 cm sur le mur du parement de l'entablement Sud, qui porte le nom de Loreto.
Façade Nord : Elle est similaire à la façade Sud et les supports de l'entablement sont des piles sans ornement. La frise est dépourvue d'inscriptions.
La construction de l'édifice semble avoir été décidée par Anne de Kredan, dame douairière de Kerestan, en l'honneur de Dieu et de Notre Dame de Loreto.
Loreto, en Italie, est le lieu où a été édifiée une basilique qui abrite le Santa Casa où l'on vénère la maison où ont vécu Marie et Joseph. C'est devenu un lieu de pèlerinage important.
Par un acte du 9 mai 1661, Louis XIV renouvela la volonté de Louis XIII de protéger les sanctuaires marials et en particulier celui de Loreto. Aujourd'hui, l'ambassade de France entretient à Loreto une chapelle et aide une fondation.
Le chemin de fer : La ligne Morlaix - Plougasnou - Primel
Dès la fin du siècle dernier, un ensemble de lignes de chemins de fer départementaux fut envisagé. En 1893, le premier train des Chemins de Fer Départementaux du Finistère circulait sur la ligne Brest Saint-Renan. La mise en service du réseau CFA (Chemin de Fer Armoricain) intervenait beaucoup plus tard et la ligne Morlaix - Primel n'était officiellement ouverte que le 1er mai 1912. Le train partait de la gare à Morlaix, longeait le quai de Tréguier, passait à la gare de marchandises du Styvel (face à la manufacture des tabacs), longeait tout le cours Beaumont. Plusieurs arrêts étaient prévus en route, passant par la maison de Paille (gare de Ploujean), le Dossen, enjambant le pont du Dourduff. La gare du Dourduff, située côté Plouézoc'h à la sortie du pont était le prélude à la difficile côte qui suivait et que le tortillard avait bien du mal à grimper.
En 1913, dès la première année de mise en circulation, il y avait trois départs de Morlaix et trois départs de Primel.
Le train mettait une heure et vingt trois minutes pour faire ce trajet ! En 1930, le train avait gagné un peu de temps, il ne mettait plus que une heure dix à une heure quinze…
Dès 1934, la ligne étant déficitaire, les rails étaient déposés. Elle n'avait vécu que vingt deux ans.